27 juin 2022 in 2022-06-27-Conseil-municipal, Actualités, Conseil municipal, Emilie Chalas

Intervention d’Emilie Chalas sur la délibération cadre pour la politique de l’habitat

Conseil municipal du 27 juin 2022

Intervention d’Emilie Chalas
sur la délibération cadre pour la politique de l’habitat

Le logement est le premier poste de dépenses des ménages français. En 1960, il représentait 6% des charges mensuelles, aujourd’hui c’est 25% et ça monte jusqu’à 55%.

Et les études montrent que les Français sont insatisfaits de leur logement qu’ils jugent : trop petits et trop bruyants. Ils attendent de l’espace (la surfaces moyenne d’un T3 a perdu 10m2 en 10 ans), des rangements, des placards, un garage pour stationner leur voiture et prendre leur vélo la tête tranquille, un rapport à la nature : jardinet, terrasse arborée.

Sur le logement social, tout le monde sait que 70% des Français peuvent y avoir droit. Tout le monde sait aussi que les ayants-droits ne demandent pas tous un logement social. Ce que l’on sait aussi, c’est que la densité de logements sociaux crée des ghettos : on le voit dans chacune de nos banlieues. Cela est le résultat de décennies de politique d’attribution des logements sociaux : on continue d’attribuer à des familles très pauvres des logements dans des quartiers… très pauvres. On continue à ne pas avoir assez de volonté pour œuvrer à la mixité sociale dont on sait pourtant qu’elle agit sur le niveau de vie de tous.

C’est pour cela que la loi SRU indique un minimum de 25% et depuis peu un maximum de 40% de logements sociaux.

Enfin, la France manque de logements, c’est une certitude, mais le parc des logements vacants est lui très important : de nombreux logements ne sont pas habités.

Il y a donc 4 conditions essentielles pour que les Français vivent mieux leur habitat :

Il faut construire des logements conforment à leurs attentes

  1. Il faut construire plus et aller chercher les logements vacants
  2. Il faut construire des logements qui répondent aux attentes des Français
  3. Il faut construire moins chers ou que le coût final du logement soit moins cher
  4. Il faut arrêter les politiques de logement ghettoïsantes.

Ce n’est qu’avec cette équation complexe que nous parviendrons à loger les Français, tous les Français, dignement, en respectant deux objectifs : le ZAN, la baisse des dépenses énergétiques.

Monsieur l’adjoint en charge du logement, de toute évidence, l’économie n’est pas votre fort. Si la baisse de 5 euros était une erreur je l’ai reconnu il y a 2 ans déjà, vos propos sur l’ISF montrent à quel point vous n’avez rien compris. L’ISF n’a pas été supprimé mais transformé en ISI. Justement, vous qui dénoncez avec outrance ces salauds de propriétaires, nous avons renforcé la taxation sur les propriétaires les plus aisés… et oui. Quant à la suppression de l’impôt sur les investissements dans les entreprises, et bien ces 3 milliards de manque a gagné ont permis de relancer la dynamique économique et de créer des emplois.

Que se passe-t-il à Grenoble ?

Comme toujours, il y a ce que vous dites monsieur le maire, et ce que vous faites.

En premier lieu vous proposez une délibération sur un sujet dont vous n’avez plus la compétence. Décidément, vous avez l’art de vous occuper de tout, d’avoir un avis sur tout sauf sur ce qui relève de vos attributions de maire…

Mais allons-y. La réalité à Grenoble est qu’en matière de production de logement la ville peine à atteindre ses objectifs entre 2017-2021 : 72% des objectifs réalisés. Pour les objectifs de logements sociaux 2017-2021 c’est pire : 62% de réalisation.

Vous annoncez fièrement page 3 un objectif de 330 logements par an, mais c’est bien inférieur à vos objectifs de PLH. Vos objectifs PLH : 434/an votre réalisé 2021 : 330 logements !

Cela fait 8 ans que vous construisez au ralenti, que les grandes opérations d’aménagement publiques n’avancent pas : Presqu’ile, la ZAC est en péril financièrement, Flaubert, on attend depuis des années, l’esplanade est encore un projet théorique !

Pourtant, la France n’a jamais autant délivré de permis de construire : plus de 2,7 millions. Le sujet est donc local. Ici, vous refusez les PC, vous faites trainer les projets tout en portant une voix contraire.

 

Sur les coûts de construction et donc revente ou de location, il y a un vrai sujet :

Le terrain coute trop cher et la construction au regard des normes de transition écologique est objectivement élevée. La question foncière doit être mieux maitrisée et à ce titre je partage avec vous que l’idée de l’EPFLD est bonne si tant est qu’elle permettre la maitrise du coût du foncier dans le temps. Sur le coût de construction, une seule solution : la puissance publique doit financer la transition écologique. L’Etat, les collectivités, l’Europe, aujourd’hui les dispositifs sont nombreux et doivent être renforcés pour mieux subventionner la construction de logements.

Enfin au bout de la chaine, les acquéreurs et locataires doivent eux aussi être aidés : faciliter les emprunts, prêt à taux zéro pour les acquéreurs. A court terme, en juillet, les APL vont être revalorisées et les loyers français plafonnés le temps de passer le cap de la crise inflationniste. Pour autant, nous ne croyons pas à l’encadrement des loyers à l’échelle locale et en dehors de la crise inflationniste. Nous avons besoin que les propriétaires immobiliers investissent dans leur patrimoine.

Sur les logements vacants : 18000 dans la métropole. Oui il faut agir. Mais que font de leur côté les bailleurs sociaux ? Combien de logements vacants dans le parc social ?

Ensuite vous plaidez pour l’habitat participatif, le bail réel solidaire, et pourtant vous faites le contraire : quid de l’opération de 30 logements de graine de bitume  avec Pluralis ? Tout est arrêté depuis 3 ans…

Sur les squats : vous n’avez jamais rien fait ! Pire vous les confortez ! Parlons du 38 rue d’Alembert, ou encore de la maison Kaminski rue des Alliés, ou encore de votre référé contre l’expulsion par le préfet du squat de 100 personnes rue Jean Macé en 2021. A Grenoble, il existe des dizaines de squats ! Si vous faisiez un peu de maraudes vous le sauriez. Là encore, il y a ce que vous dites et il y a ce que vous faites.

Vient ensuite le chapitre « Prévenir les expulsions ». Plutôt osé, quand on sait le nombre d’expulsions avec recours à la force que vous demandez chaque année à la préfecture. Prenons l’exemple d’ACTIS : 165 demandes déposées en 2 ans, c’est même l’Etat qui régule vos demandes tellement elles sont nombreuses. Et pourtant vous osez rappeler l’arrêté de 2019 pour interdire les expulsions. C’est tout de même le comble du cynisme politique : vous prenez un arrêté anti-expulsion que vous savez illégal, le préfet le fait annuler. Vous criez au scandale en même temps que vous demandez par ACTIS l’expulsion de 165 familles ! C’est quand même bien cynique et bien moche.

Un mot à cette occasion sur Grenoble habitat. Nous avons rencontré les représentants du personnel : ils sont inquiets. D’abord parce qu’ils n’ont aucune information, même en tant que CSE. Ensuite parce qu’ils découvrent que vous avez mandaté une AMO pour la vente de GH ? Qu’en est -il ? Enfin, parce qu’ils s’interrogent sur la réelle obligation de cession des parts de Grenoble Habitat ? Contrairement à ce que vous prétendez, ce n’est pas la loi ELAN qui oblige la cession des parts de la ville de Grenoble dans GH. Redites-nous s’il vous plait ce qui impose cette vente ?

Vous évoquez aussi l’accompagnement des locataires et la lutte contre l’habitat indigne. Encore une fois, il y a un gouffre en ce que vous annoncez et ce que vous faites réellement ! Je vous lis ce mail :

« En ce mois de mai 2022. Sans grande surprise pour moi Le juge a ordonné à Actis un désamiantage. Cela fait presque que 4 ans que je vis cette galère, avec deux gamins a charges. J’ai sollicité tous les services de la ville et de la région (tout ce que j’avance est prouvable). Malgré tous les éléments que je leur ai fournis et les multiples appels au secours, comme un accord  ils se sont rangés du côté  d’Actis et ont agi en « bande organisée » pour tenter de me faire suffoquer.  Sans la moindre considération pour nos vies ou pour leur  » professionnalisme »  ou juste conscience. Ce scandale ne doit pas passer sous silence dans la première ville écolo de France. En tout cas moi je ne compte pas m’arrêter là. Me prendre avec mes enfants en otages autant de temps, c’est pas rien pour la femme et surtout la mère que je suis. »

La réalité à Grenoble c’est :

  • Le squat du 38 rue d’Alembert : 230 000€ d’investissement et un loyer de 330€ par mois
  • La Papothèque : 0€ d’aide de la ville et un loyer de 1800 € au Lys Rouge pendant que l’Etat a versé 8000€, la métropole 5000€ et les citoyens 2000€ via une cagnotte. Heureusement pour la Papothèque, le tribunal administratif a rejeté l’expulsion demandée par ACTIS
  • La Croix-Rouge qui doit réduire ses activités car les nouveaux locaux fournis par la ville sont trop petits
  • Les Restos du cœur qui sont toujours en attente de nouveaux locaux

En conclusion, sur les grandes lignes de votre délibération, nous sommes plutôt d’accord. Mais hélas, la réalité de votre gestion est bien éloignée de ces intentions énoncées, nous souhaitons à travers cette intervention dénoncer ces contradictions qui font tant de mal à notre ville, à ses habitants et à la politique. Ne pas faire ce que l’on dit et ne pas dire ce que l’on fait vraiment, c’est tromper, duper les habitants. Cela participe au renoncement de l’engagement : la confiance se gagne, se construit par la cohérence entre ce que l’on dit et ce que l’on fait. Alors, oui vous avez été élu, puis réélu, oui pour ma part j’ai perdu les élections législatives face à la Présidente d’Actis qui incarne exactement ce cynisme que nous dénonçons : des années de mandat, des promesses à tout va mais une réalité qui ne change pas la vie de nos concitoyens. Fortes de nos convictions et sincères dans notre démarche, nous ne renoncerons pas à dénoncer votre imposture et faire reconnaitre votre double langage. Si les convictions, le travail et la sincérité ne mènent pas aux responsabilités politiques, mais que le cynisme, les paroles dans le vent et le carriérisme politique restent vainqueurs, et bien nous continuerons notre engagement différemment. Droites dans nos bottes. En espérant qu’un jour, les habitants s’intéresseront de près à votre bilan, s’intéresseront à nouveau à la politique et choisiront des élus dignes de leurs préoccupations quotidiennes, que ce soit nous ou d’autres.